All Nightmare Long: métaphysique du brouillard

Aujourd’hui, un cours d’électricité, une micro-sieste, et une tentative de… de vous verrez quoi.


Ce matin, la météo prévoit de généreuses averses, ce qui fait moyennement mes affaires : ce n’est pas très agréable de pédaler sous la pluie.

Ceci étant, un de mes grands-oncles, pilote dans la Royal Air Force, avait une devise de vie :

On fonce dans le brouillard !

Allez, bien dit tonton. Aujourd’hui, on va foncer dans la pluie. Je me prépare et file, direction Dordrecht en train, puis Eindhoven sur le vélo.

En juillet dernier, j’ai déjà roulé de la maison jusqu’à Dordrecht — un peu moins de 70km. Aujourd’hui je vais donc pouvoir relier la maison au point de départ de mes voyages vers Francfort (puisque j’étais parti d’Eindhoven) et Munich.

Kinderdijk, sur le chemin vers Dordrecht

Mais venons-en à un peu d’électricité. Ma cousine m’a demandé d’expliquer les blagues des derniers articles.

En Allemagne, j’étais tombé sur un bateau de la police fluviale (Strompolizei, littéralement : la police du courant), ce qui avait occasionné la punchline suivante :

Cette brigade comporte certainement un effectif important : il en faut des hommes pour contrôler le courant.

La résistance électrique mesure l’aptitude d’un matériau à s’opposer au passage du courant électrique et son unité est l’ohm. Ça se prononce comme “heaume”.

Ensuite, la rivière Amper, près de Munich.

Et alors, je me demande : y a-t-il beaucoup de courant dans la rivière Amper ?

L’unité du courant électrique est l’ampère.

Et que disent les passagers d’un bateau qui a chaviré sur cette rivière ? Nous coulons !

Le coulomb est une unité de charge électrique, ça correspond à la charge traversant un conducteur parcouru par un courant de un ampère, pendant une durée d’une seconde.

Parallèlement à la rivière, il y a le canal Amper qui coule, forcément dans le sens opposé à la rivière, vu qu’il est en inversion !

Dans un composant électrique qu’on appelle le transistor à effet de champ, le courant circule dans une zone appelée le canal, et les charges électriques constituant le canal sont appelées la couche d’inversion.

Celle-là est moins facile, j’avoue, il faut une… grille (de lecture)

Le courant traversant le transistor peut être modulé par la tension appliquée sur celle de ses électrodes appelée la grille.

Je sais que des spécialistes me lisent, j’espère avoir donné des informations exactes et rigoureuses.

Ce sera toujours mieux qu’un de mes anciens collègues, qui avait écrit dans le premier chapitre de sa thèse que la différence essentielle entre un transistor bipolaire et un transistor à effet de champ est que le courant se déplace verticalement dans le premier et horizontalement dans le second.

C’est un peu comme si vous disiez que la différence essentielle entre une plaque de cuisson au gaz et une plaque de cuisson à induction, c’est que les boutons n’ont pas la même forme.


Bref, passons à la suite : le vélo.

En débarquant à la gare de Dordrecht, je passe par Albert Heijn pour me constituer un bout de pique-nique. Pendant ce temps, une gentille cycliste surveille mon vélo. Elle va participer à une course dans le coin.

À proximité de la gare, je passe devant un magasin au nom bien scandinave.

Ce n’est pas lui devant le magasin : Odin est le dieu le plus important de la mythologie nordique, il ne se promène donc pas en claquettes.

Ça me rappelle les quelques jours passés à Stockholm avec Grogu (mon petit garçon), le musée viking, les roulés à la cannelle. Et une chanson, aussi.

Je sors de Dordrecht en suivant les cours d’eau, et en chemin je reconnais quelques maisons.

Maisons au bord de l’eau

Je suis déjà passé par ici il y a huit ans, lors d’un précédent voyage à vélo. À l’époque, c’était en tandem, et Grogu, âgé de un an, babillait dans sa remorque.

Extrait de l’album photo

Je continue le long d’un canal, dans ce qui commence à ressembler à de la campagne, jusqu’à un large bras de la Meuse, où il faut emprunter un bac.

Juste devant le bac, une péniche nommée Sagittarius passe.

Sur le bac, avec la proue de la péniche Sagittarius

J’ai bien de la chance d’ailleurs, si Sagittarius est une inoffensive péniche, Sagittarius A* n’est pas du tout la même chose. À deux caractères près, j’étais face à un trou noir supermassif.

Image de Sagittarius A*

De l’autre côté, c’est le parc national De Biesbosch. Il s’agit d’une zone humide avec de nombreux petits cours d’eau entourant des îles et des marais, où l’on trouve surtout des roseaux et des saules. Il y a aussi des castors et bien évidemment beaucoup d’oiseaux qui se plaisent dans ce genre d’environnement, comme plusieurs espèces de hérons ou des spatules. Je croise beaucoup de photographes animaliers par ici.

Au village de Hank, je suis sorti du parc ; j’en profite pour m’installer au pied de l’église et y faire une pause. Il ne fait pas très beau, il y a du vent, mais contrairement aux prévisions météo il ne pleut pas.

Église de Hank

Pas grand-monde dans ce village. Même pas Hank, le conducteur de diligence dans Lucky Luke. Connu pour sa finesse en cuisine.

Hank dans l’album La Diligence

Une fois reparti, je longe brièvement un bras de la Meuse appelé Vieille Meuse, qui correspond au lit historique de la Meuse jusqu’à son embouchure.

Vieille Meuse

Puis c’est un nouveau parc, celui des Loonse en Drunense Duinen. Comme celui de Haute Veluwe, il comprend des dunes et de la forêt, ainsi que de vastes étendues de bruyère.

Bruyère et forêt
Dunes et forêt

Sorti du parc, le soleil apparaît. Le paysage change, mais ça reste la campagne, puis je traverse un autre parc (Kampina) avec une flore similaire à celle du parc précédent.

Kampina
Campagne

Ça fait un moment que j’ai du vent de face, et alors qu’il reste environ vingt-cinq kilomètres jusqu’à Eindhoven, je commence à sentir un peu de fatigue. Le prochain village c’est Oirschot, je prévois de m’y arrêter un moment.

Au pied de l’église, je découvre une boulangerie avec de petites tables agencées sur le trottoir : je m’attable pour un pain aux raisins et une bouteille de jus pomme-fraise. Rien de palpitant mais ça me permet de faire le plein pour finir la journée.

Oirschot

Reste une petite heure à pédaler, le long de la route direction Eindhoven ; la traversée du canal Beatrix, et une longue ligne droite jusqu’au centre-ville.

Canal Beatrix
Piste cyclable vers Eindhoven

J’entre dans la ville, dans le quartier Strijp-S. C’est un ancien complexe industriel de Philips, reconverti en un quartier résidentiel : le passé du coin saute aux yeux.

Un petit kilomètre et c’est la gare, où je me contente d’un jus d’orange. Je cherche en vain le magasin de beurre de cacahuète aperçu le jour où j’ai débarqué ici pour commencer le voyage vers Francfort. La vendeuse du jus d’orange m’informe que le magasin ne marchait pas très bien, et que malheureusement il a fermé.

Le défunt magasin de beurre de cacahuète de la gare d’Eindhoven

Avant de monter dans le train, je mets aussi ma veste parce que j’ai roulé avec le maillot du club cycliste du boulot : je ne sais pas en quelle matière il est fait, mais il pue, c’est horrible. Je m’incommode moi-même.

Ça ne m’empêche pas de faire une micro-sieste dans le train.

Arrivée

Finalement, je n’ai pas eu de pluie du tout. J’ai eu du vent de face, mais rien de vraiment pénible. Bref, j’ai tenté de foncer dans le brouillard, et celui-ci était finalement moins terrible que ce à quoi je m’attendais.

L’écrivain Mark Twain disait : “J’ai eu beaucoup de problèmes dans ma vie. La plupart ne sont jamais arrivés”.

Façon de dire que le brouillard, c’est surtout dans notre tête. Ce qui ne doit pas nous empêcher pas de foncer dedans.


Bilan de la journée :

  • Distance : 100,9km
  • Temps de pédalage : 4h25
  • Dénivelée : 184m

Crédits :


The light that is not light is here
To flush you out with your own fear
You hide, you hide but will be found
Release your grip without a sound
Still life, immolation
Still life, infamy
Hallucination, heresy
Still, you run, what’s to come? What’s to be?

5 commentaires sur « All Nightmare Long: métaphysique du brouillard »

  1. Finalement ça valait le coup de foncer dans le brouillard : de jolis paysages, une belle lumière et de belles couleurs !
    Merci pour le cours sur l’électricité. Je n’avais pas compris tous les jeux de mots !

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  2. Papa, c’est juste ce que Manu raconte sur l’électricité ?? 😃
    J’espère que ton ancien collègue thésard ne lit pas ton blog… 😂
    Bravo pour avoir défié et modifié la météo !! 💪

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  3. Merci Manu d’avoir éclairé ma lanterne, j’étais pas au courant!!! 😉

    J’étais allée me promener dans des dunes lorsqu’on était passés dans ma famille de Tilburg avant de venir chez toi il y quelques années, c’est joli et drôle!

    Magnifique photo avec les bruyères.

    RIP le pindakaas shop…

    A bientôt!

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  4. A Julia et tous les autres, Manu ne raconte pas que des conneries .
    Pour ce sujet très électrique, nous pouvons lui faire confiance, pour le reste il faudra confirmer…

    Merci encore Manu pour ces belles aventures que nous essayons de suivre du mieux possible.
    Les références sont diverses et variées : depuis les trous, les dieux du nord bien chaussés, jusqu’à Lucky Luke , il y en a pour nous tous et pas forcément aussi cultivés que toi.

    Nous attendons avec impatience les prochains épisodes!

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