The frayed ends of sanity : bientôt le retour

Les derniers jours en Thaïlande.


En réponse à ma sœur qui voudrait voir davantage de photos et de récits de voyage : j’ai une solution, vous n’avez qu’à vous cotiser et me payer le prochain billet d’avion 😄

En attendant, retrouvons-nous à Krabi où nous venons d’embarquer dans l’avion pour Bangkok.

Cette fois-ci, on nous sert un petit gâteau fort bon : nous sommes le 31 décembre et Thai Airways nous souhaite une bonne année.

Bonne année

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Pendant le vol, j’ai occupé mon temps en regardant un documentaire (que vous devriez pouvoir retrouver sur Prime Video) appelé Burnout: the truth about work.

Beaucoup de thèses sur l’évolution du travail à travers l’histoire humaine et quasi rien sur les symptômes d’un épuisement professionnel : rien à voir, a priori, avec ce qu’on appelle un burnout.

Et pourtant. 

Une idée développée se base sur l’héritage du Puritanisme (courant religieux issu du calvinisme) : les Puritains considéraient le travail comme un moyen de servir Dieu et voyaient donc dans un travail acharné une manière de trouver le salut. Faire une pause parce que vous êtes malade ou que vous avez besoin de repos ? C’est le signe que votre foi manque de ferveur.

En réalité, que se passe-t-il si on lève le pied de l’accélérateur ? Au fond, on n’en sait rien, parce qu’on appuie sur l’accélérateur justement pour ne pas avoir à faire face à ce qui se passerait, voire pour simplement éviter de se poser la question.

Par ailleurs, comme exposé dans le documentaire, nous nous plaignons souvent d’être traités, dans notre travail, comme des objets n’ayant d’autre valeur que l’utilité que nous avons.

Mais nous en faisons autant avec nous-mêmes. Nous nous considérons comme une valeur utilitaire, nous identifions ce que nous sommes à ce que nous faisons, à ce que nous possédons, comme si nous n’avions pas de valeur intrinsèque. Et c’est en réalité bien confortable, car cela nous permet de ne pas nous confronter à l’embarrassante question : qui suis-je sans ce que je fais ou ce que je possède ?

Ceci dit, il ne s’agit pas de tout jeter aux orties, et de tout plaquer pour aller du jour au lendemain élever des chèvres dans le Larzac. D’ailleurs, un tel changement de vie serait-il la solution à tous vos problèmes ?

Il suffit peut-être de réaliser que notre boulot, et tout ce que nous achetons, n’ont pas vocation à nous rendre heureux. De changer notre attitude et de faire les choses pour elles-mêmes, parce qu’il n’y a à l’extérieur de nous-mêmes nulle part où aller et aucun salut à trouver.

C’est à dire, pour en revenir au burn-out, de trouver un rapport plus sain, plus apaisé, dépourvu de culpabilité et d’attentes, à notre environnement. Et à garder à l’esprit, dans le cas du travail, que ce que nous croyons être comme des nécessités incontournables sont avant tout le legs d’une éthique ultra-religieuse, passablement intégriste, et vieille de cinq cents ans. Comme suggéré en filigrane dans le documentaire, tout cela mériterait d’être dépoussiéré et remis en perspective à l’aune de l’évolution du monde.

On peut déjà commencer à le faire pour soi-même : comme le disait le psychiatre suisse Carl Gustav Jung, “Tant que vous n’aurez pas rendu l’inconscient conscient, il dirigera votre vie et vous appellerez cela le destin”.

Je vous laisse réfléchir à ça, moi je retourne à Bangkok avec Bo-Katan.


On arrive à l’hôtel et après y avoir jeté les affaires, on va directement à IconSiam, le centre commercial visité il y a dix jours. Bo-Katan achète un cadeau pour son collègue qui vient de se marier, et puis on teste quelques trucs avant de retourner en Europe.

  • La viande de crocodile : ça ressemble au poulet mais avec un goût légèrement plus fort et une consistance nettement moins ferme, comme si c’était du poulet pas suffisamment cuit.
Comme le rappelle Crocodile Dundee, “c’est bourré de vitamines, mais ça a un goût de chiotte”
  • Le mangoustan : un peu comme un lychee mais moins juteux, et à mon goût bien moins savoureux.
Mangoustan
  • Le durian : celui qui a la réputation de fruit qui pue (d’ailleurs, le sigle dans le taxi interdisant la lecture ou le visionnage du Seigneur des Anneaux, et qu’on a retrouvé dans des ascenseurs d’hôtels, ça veut en réalité dire : durian interdit). L’odeur n’est pas très forte, mais elle est âcre et vous attrape le nez. Pour la décrire, je dirais que ça me fait penser à la couche de Grogu quand il avait une diarrhée parce qu’il faisait ses dents. Nous n’avons pas trouvé ça très bon (le durian, pas la couche de Grogu).
Durian

IconSiam aujourd’hui, c’est bien moins agréable que la fois précédente : c’est blindé de monde, au point que c’en est oppressant. C’est sans doute lié aux préparatifs du Nouvel An, et aux festivités prévues dans le centre commercial.

Food court
Magasin Lego (photo prise à la base pour Grogu)

Comme d’habitude, autour d’IconSiam, c’est le foutoir. L’idée du métro aérien, dont une station se trouve juste devant l’entrée, se révèle vite compliquée puisqu’une cinquantaine de personnes font la queue devant l’unique distributeur de billets.

Alors nous prenons un tuktuk.

Tuktuk
Tuktuk, illustration

Pour le soir, on va manger dans un restaurant japonais, et on mange du Wagyu (connu aussi sous le nom de bœuf de Kobe). C’est délicieux, on le cuit quelques secondes au bouillon, un peu à la manière d’une fondue chinoise, et ça fond dans la bouche comme un morceau de beurre.

Wagyu

Un des Dominique du stage de vélo en Ardèche était vétérinaire à la retraite. Il avait expliqué que c’est une viande très grasse (ça se voit sur la photo) et c’est pourquoi elle est si fondante et savoureuse.

Wagyu

Lorsque nous quittons les lieux, la gentille serveuse nous dit merci beaucoup en français avec un “Massi boulou”. Ça me fait penser à un épisode de la série Friends, mais je trouve ça adorable.

Fatigués, nous rentrons à l’hôtel et nous allons au lit à 22h comme des petits vieux.

En chemin, la dernière soirée de 2024 bat son plein.

Dans notre rue

Vers minuit, nous nous faisons réveiller par le bruit de feux d’artifice et de pétards. Comme aux Pays-Bas. Ça valait le coup de faire douze heures d’avion, tiens.

Le 31 décembre, Bangkok a abusé des fayots

Ceci dit : bonne année tout le monde.


Le lendemain matin, on quitte l’hôtel dans la matinée, pour aller à Wat Paknam Bhasicharoen, un temple où se trouve une statue géante du Bouddha.

C’est surprenant. J’ai l’impression que nous sommes les deux seuls occidentaux. C’est plein de monde, comme à IconSiam la veille, et pourtant l’atmosphère est apaisante et tranquille.

Wat Pakman
Wat Pakman
Bouddha

D’ailleurs, un chat qui se promène dans le coin ne s’y est pas trompé : il déambule tranquillement au milieu des gens (pas fou, je le vois aussi chiper un peu de nourriture qui traîne sur une table).

Tranquille

Il y a beaucoup de de stands où l’on peut faire des donations et acheter de la nourriture sans repartir avec : c’est exclusivement de cela que vivent les moines.

Quant à la statue géante du Bouddha, déception : elle est invisible, couverte d’échafaudages. Je vous mets donc une image trouvée sur Wikipedia.

Statue de Wat Pakman

En essayant de quitter le temple, nous remarquons sur la carte que celui-ci est situé dans un quartier entièrement entouré de canaux, et qu’il n’y a qu’une seule route pour y accéder. Voilà pourquoi le trajet en taxi était interminable.

Les embouteillages, c’est un peu une image de Bangkok que je vais garder. Un gros merdier, une voirie souvent incohérente et mal structurée, et un code de la route apparemment minimaliste (HIDALGO DÉMISSION !!!).

Mais personne ne se met en colère ou ne montre d’impatience. Rien à voir avec l’attitude européenne, donc. En même temps, si vous êtes coincé dans le trafic, est-ce que klaxonner comme un con et râler comme putois change quelque chose ?

You are not stuck in traffic. You are traffic.

Nous laissons donc le coin à pied, en empruntant une passerelle piétonne. Ça nous mène, surprise, vers un autre temple, avec une autre statue.

Wat Khun Chan
Wat Khun Chan

Ensuite, un taxi nous conduit à Chinatown et le quartier Talat Noi, au bord du fleuve. C’est paisible et bariolé. Nous déjeunons dans un restaurant tranquille à la décoration surprenante, Hong Sieng Kong.

Hong Sieng Kong
Hong Sieng Kong
Terrasse

Après le restaurant, nous déambulons dans le quartier.

Ma sœur et mon beau-frère ont une Fiat 500. J’espère que celle-ci n’est pas la leur, ou alors qu’ils ont une bonne assurance.
Talat Noi
Quand mes oncles avaient la vingtaine, ils bricolaient des moteurs de bagnole dans le garage de mes grands-parents. Un jour, ils en ont sorti une tonne de ferraille. Comme vous le voyez, j’en ai retrouvé la trace.
Talat Noi
Talat Noi
En plein quartier chinois, ça fait ambiance coloniale, façon Le Lotus Bleu

Nous continuons à marcher jusqu’à la porte de Chinatown.

Porte de Chinatown

À proximité de la porte, nous trouvons Wat Traimit Witthayaram Worawihan, le Temple du Bouddha d’Or. Encore un endroit bien tranquille et apaisant. Nous y achetons des petites statues du Bouddha.

Temple du Bouddha d’or

La suite est bien différente, c’est le quartier chinois marchand. Beaucoup de magasins, de marchés dans les petites rues, mais aussi beaucoup de bruits et d’odeurs pas toujours agréables.

Chinatown
Marché

Dans Bangkok, nous nous sommes déplacés exclusivement en voiture.

Mais on ne peut pas vraiment marcher et c’est difficile d’identifier des quartiers particuliers avec une certaine identité, un certain caractère. Hormis Chinatown, tour à tour sympa (le coin des petits restaurants et des temples) ou plus bouillonnant (là où il y a le marché).

C’est quand même une ville fascinante et dépaysante.

Nous rentrons ensuite à l’hôtel pour un peu de repos. Dans la soirée, nous allons manger dans une pizzeria du quartier, puis nous prenons la route de l’aéroport.

Après quelques heures d’attente, nous grimpons dans un avion.

Avec tous ces boutons, j’ai l’impression que c’est moi qui vais piloter l’avion

Sept heures plus tard, nous sommes à Dubai.

Dubai
Dubai

Bo-Katan prend un avion pour Amsterdam, elle va retrouver ses enfants. Moi je vais à Lyon pour retrouver Grogu.

Vallée de la Tarentaise entre Pomblos et Bourg St-Maurice.

Fin du voyage.


Marcel Proust disait :

Le véritable voyage de découverte ne consiste pas à chercher de nouveaux paysages, mais à avoir de nouveaux yeux.

Ici, nous avons eu de nouveaux paysages. Mais aussi de nouveaux yeux, en tout cas pour nous-mêmes.

Les thaïlandais m’ont globalement donné l’impression d’être détendus, souriants et heureux. A contrario, je me souviens un matin, à Railay Beach, d’avoir observé les occidentaux au buffet du petit déjeuner, et d’avoir vu leurs mines bien graves et soucieuses. Qu’est ce que ça doit être quand ils ne sont pas en vacances. Mais c’est un miroir : je suis certainement comme ça moi aussi.

Le documentaire vu dans l’avion entre Krabi et Bangkok dit que nous ne sommes pas obligés de nous identifier à notre travail ou à nos possessions.

Ce documentaire — et un livre sur le bouddhisme feuilleté dans la chambre à Anda Lanta également — me laisse à penser que nous ne sommes pas non plus obligés de nous identifier à nos soucis, à nos rancœurs, à nos impatiences, à notre anxiété, à nos jugements sur nous-mêmes et sur le monde.

Nous y sommes attachés parce que tout cela constitue une gamme de réactions machinales, et nous offre un ancrage familier, une consistance rassurante. En réalité, ça nous donne surtout l’illusion d’exister, et ça nous épargne l’effort terrifiant de regarder en face ce que nous pourrions être.


Ceci dit, au-delà de tout ce blabla nébuleux, il y a Bo-Katan. Voyager avec elle, c’était ce qu’il y avait de mieux dans ce périple.


Crédits :


Struggle within, triggered again
Now the candle burns at both ends

Twisting under schizophrenia
Falling deep into dementia

Old habits reappear
Fighting the fear of fear
Growing conspiracy, everyone’s after me
Frayed ends of sanity
Hear them calling
Hear them calling me

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