Aujourd’hui, une journée Gamel Trophy comme on les aime.
Pour rappel, j’ai déjà eu deux journées du même genre.
La première, c’était (même si je ne l’avais alors pas qualifiée comme telle) lors de mon voyage vers Paris, entre Compiègne et la Seine-et-Marne. En pleine forêt d’Ermenonville, j’avais été confronté à la pluie et aux chemins pourris barrés de troncs d’arbres. La deuxième, c’était en revenant d’Amsterdam, avec (encore) la pluie, le vent de face et un itinéraire largement sous-estimé.
Mais revenons à aujourd’hui, une journée a priori au temps sec. Le parcours est tranquille, il a déjà été effectué il y a une dizaine d’années et ne m’avait laissé le souvenir d’aucune difficulté.
Sur mon ordinateur, le dossier dans lequel se trouve le fichier gps indique soixante-dix kilomètres, soit une grosse demi-journée à pédaler. En comptant le voyage en train, je serai de retour en milieu d’après-midi. À 19h j’ai prévu d’assister à une webconférence de Christophe André.
Je pars de la gare de Rijswijk, puis à La Haye, je monte dans un train pour Apeldoorn. Un groupe d’adolescentes voyage vers l’Allemagne, sans doute pour un voyage linguistique. Mon vélo disparaît derrière une montagne de sacs et de valises tandis qu’une petite fille de deux ans me regarde en souriant et me montre fièrement son livre.
À Apeldoorn se trouve un palais de la famille royale néerlandaise, mais on s’en fiche parce que ce n’est pas là que je vais. Je quitte rapidement la ville.

À Lieren, je tombe sur une gare avec des locomotives à vapeur, certaines sont encore utilisées pour des circuits touristiques. Ça me rappelle les vieux albums de Tintin.
D’ailleurs dans Tintin en Amérique, Tintin arrive à Chicago en train, et prend un taxi pour son hôtel. Mais quel est le nom de son hôtel ? Je préviens les gourmands que j’ai trouvé une recette de crème renversée.

Un peu plus loin commence la forêt, il y en a beaucoup dans la province de Gueldre. Il y a quelques maisons mais aussi de nombreux campings. L’hiver rappelle qu’il n’a pas dit son dernier mot.


J’arrive ensuite dans le parc de Haute Veluwe, parc national rempli d’une forêt paisible et accueillante. J’adore ce parc et c’est à dessein que j’ai choisi mon itinéraire du jour : le parc se situe pile entre Apeldoorn et Amersfoort.
Cependant c’est là que s’invitent les prémices de la journée Gamel Trophy : je réalise que mon parcours compte vingt kilomètres de plus que prévu. Par ailleurs, j’ai oublié de télécharger mon fond de carte, donc au bout de deux heures à peine la batterie de mon téléphone tire la langue.
Pour l’instant ça va, j’ai une batterie externe, et tout cela ne devrait pas m’empêcher d’arriver à temps pour Christophe André. C’est donc avec grand plaisir que je file à travers le parc.


J’achète mon déjeuner au food truck situé à côté du restaurant du parc. Food truck certes, mais n’allez pas imaginer un truc de hipster avec des casse-dalle élaborés : j’ai mangé un sandwich vendu sous son emballage plastique. Assez bon au demeurant (ceci dit en rando tout est bon), mais vous pourriez trouver la même chose au supermarché.
À côté, une fanfare joue quelques airs entrecoupés de discours solennels, quoique le vendeur du food truck m’informe qu’il n’y a pas d’occasion particulière.

Bon, c’est pas que je m’ennuie, mais je doute que Christophe André m’attende, donc je reprends la route. Je laisse le parc, la forêt continue.


Alors que j’approche d’Amersfoort, un alpaga bien curieux m’observe. Ses propriétaires vont pouvoir tricoter plein de bonnets.

Juste à côté, une maison arbore un drapeau ukrainien. J’en vois vraiment beaucoup en ce moment : dans les champs le drapeau néerlandais, ou celui de la province locale, est souvent remplacé par les couleurs de l’Ukraine.

Enfin, c’est l’arrivée à Amersfoort. Après quatre-vingt dix kilomètres et du vent de face depuis le parc de Haute Veluwe, me voilà bien rincé.

Cependant les lutins du Gamel Trophy sont à l’œuvre.
À l’intérieur de la gare, le panneau des départs m’informe que tous les trains sont annulés. Enfin non, sauf un, mais c’est un train régional et il ne va pas du tout là où je veux aller. Un message sur le panneau explique qu’il y a un problème technique (sans blague ???) et qu’aucun train ne circule.
Me voilà bien, tiens. Ça commence à sentir le retour à vélo.
Un employé des NS me dit qu’un bus va partir pour Utrecht (à une vingtaine de kilomètres d’ici) dans quelques minutes : ce sera toujours ça de gagné. Quand je demande au chauffeur si j’ai le droit monter dans son bus avec mon vélo, il me répond « ben pas vraiment, mais si tu le tiens bien ça ira ».
L’application des NS dit qu’il n’y aura pas de train avant 17h. À Utrecht j’ai peut-être une chance de sauver mon rendez-vous avec Christophe André.

Le bus part à 17h et j’arrive à la gare d’Utrecht une heure plus tard. Pas davantage de trains ici, et le panneau dit qu’aucun ne roulera avant 20h. L’application des transports en commun me propose un voyage en bus vers La Haye, mais ça va prendre plus de trois heures, avec cinq changements et évidemment aucune garantie que je trouve de la place pour mon vélo. La journée Gamel Trophy est alors à son apogée : l’éventualité d’un retour à vélo passe du niveau “probable” à “évident”.
J’envoie un texto à Christophe André pour qu’il décale sa conférence, mais il me répond qu’il ne peut pas et que je n’aurai qu’à profiter du replay en pleine conscience.
Avant de retrouver le moment présent, je fais le plein au Albert Heijn de la gare en prévision des soixante-dix kilomètres qui m’attendent.
Puis je file à travers la campagne de la province d’Utrecht, un kilomètre après l’autre, en limitant les pauses. Le ciel s’est dégagé et le soleil devient rasant, c’est bien agréable.


À Gouda, j’assiste à un beau coucher de soleil. Il reste encore une trentaine de kilomètres. J’avais encore un vague espoir de récupérer un train, mais l’application des NS m’informe qu’aucun train ne circulera jusqu’à demain. Dernière ligne droite le long de l’autoroute A12.
Notez que je ne me plains pas : les sites d’infos expliquent que l’aéroport Schiphol (desservi par une des gares les plus fréquentées du pays) s’est transformé en un gigantesque foutoir à l’intérieur et en un embouteillage géant à l’extérieur. Pour ma part, je vais pouvoir rentrer à la maison, il fait beau, le moral est bon et les jambes solides.
En effet, avec plus de cent trente kilomètres dans les pattes et une arrivée à Amersfoort en étant déjà bien fatigué, je trouve que je suis étonnamment en forme. Bernard Tapie disait « quand tu crois que t’es au bout, t’as fait à peine la moitié ». Bien dit Nanard.

J’arrive à la maison vers 22h30. Après une douche, je m’effondre au lit en zappant le replay de Christophe André — le moment présent, ce sera pour plus tard — et en acceptant que je ne serai pas ultra productif le lendemain.
J’ai finalement adoré ma journée Gamel Trophy : rouler face au coucher de soleil, et même la nuit, a été vraiment chouette. Je n’ai croisé que peu de gens, ça m’a rappelé la tranquillité de l’Eurovélo 3 en octobre.
Bilan :
- Distance = 160km (prévue : 70km)
- Temps passé à pédaler = 8h31 (prévu : environ 3h30)
- Dénivelée = 383m, ça reste peu mais la province de Gueldre est suffisamment vallonnée pour sortir d’une dénivelée dûe au bruit de l’altimètre.
I want to live, I want to give
I’ve been a miner for a heart of gold
It’s these expressions I never give
That keep me searching for a heart of gold
And I’m getting old
Keep me searching for a heart of gold
And I’m getting old
I’ve been to Hollywood, I’ve been to Redwood
I crossed the ocean for a heart of gold
I’ve been in my mind, it’s such a fine line
That keeps me searchin’ for a heart of gold
And I’m getting old
Keeps me searchin’ for a heart of gold
And I’m getting old
Pas de pluie, pas de troncs au milieu de la route ? Trop facile !! 🙂 Bravo Manu pour ce périple et le moral gardé jusqu’au bout !!!
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Bravo pour ce périple extraordinaire .
Quelles belles formes physiques et morales !!!!
Elles ont largement compensé des prévisions presque exactes…
Juste un peu déçu du manque d’événements, mis en bouche par l’évocation du Gamelle Trophy.
Bravo encore et à très bientôt.
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Comme quoi une simple sortie à vélo réserve tjs des surprises 😂
Et l’hôtel de Tintin, c’est l’hôtel Osborn bien sûr!
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Bravo pour ce voyage, plein de surprises et de difficultés inattendues ! Bravo pour ton moral soumis à rude épreuve !
Tout le monde sait dans la famille que l’hôtel de Tintin est l’hôtel Osborn, grâce à Alexis qui nous a fait lire « Tintin en Amérique » un certain nombre de fois !
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Bravo pour le périple ! On imagine bien la situation de panique à Schipol, parce que même en temps normal…
Ce parc de Haute Veluwe est un lieu exceptionnel qui remplace largement une conférence de C. André.
À quand le prochain défi ?
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Très belles photos et des commentaires au top! Belle reprise 👏🏻 Nanard!!!!🤣
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NS / SNCF même combat !!!
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je me méfierai si tu me proposes une rando à vélo, surtout si tu me dis que tout est prévu…
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T’es trop super (nanard Hinaut). Trop fort aussi. Comme quoi une journée de galère peut se transformer en journée sympa. Merci de nous avoir fait partager ceci.
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