Who by Fire: Toucher l’Histoire

Nous voilà de retour en Israël. Aujourd’hui, il est question de voyage dans le temps et de désert. Peut-être même des deux à la fois. Vous verrez bien.


Résumé de l’épisode précédent : deux jours à Tel-Aviv, puis Bo-Katan vient me chercher.

Après avoir quitté Tel-Aviv, nous voilà donc dans le kibbutz où vivent les parents de Bo-Katan, non loin de Jérusalem. Je suis très heureux de les revoir et je m’empresse de marquer mon territoire au moyen de Thé des Marmottes, de sablés savoyards et d’une tomme fermière des Bauges.

Même pas de vaches tarines en Israël ! Comment font-ils pour leur Beaufort ?

Je suis aussi content de retrouver Bo-Katan, car, vacances scolaires oblige, je ne l’avais pas vue depuis trois semaines ❤


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Une douche, un repas et une nuitée plus tard, Bo-Katan pique la voiture de sa mère et m’emmène à Jérusalem. Sur le chemin, nous nous arrêtons chez un traiteur libanais du village voisin, Abu Gosh, pour acheter de quoi faire un pique-nique.

Shabbat oblige, les rues sont presque vides, d’autant que la population de Jérusalem est bien plus religieuse que celle de Tel-Aviv.

Bo-Katan me conduit à la Knesset, c’est le parlement israélien. Elle baratine le garde en lui expliquant que je suis venu d’Europe exprès pour ça, donc j’ai le droit de franchir la barrière et de prendre quelques photos.

L’entrée de la Knesset

Images pas vraiment concluantes, mais j’aurai vu le truc de près. La prochaine fois qu’on va à Paris, j’emmène Bo-Katan à la buvette de l’Assemblée Nationale.

La sculpture à droite sur la photo, sous les arbres, est un mémorial dédié aux victimes de l’Holocauste ; rien d’étonnant, donc, à ce qu’elle me fasse immédiatement penser au monument trônant au camp de Dachau, même si les deux œuvres ont été réalisées par deux sculpteurs différents.

La sculpture devant les portes de la Knesset
Dachau

Mais sans plus attendre, rendons-nous au Musée d’Israël, non loin de là. Il présente des collections archéologiques avec des objets découverts dans la région, depuis la Préhistoire jusqu’à la période de l’Empire Ottoman.

On y trouve aussi des collections de peintures et de sculptures. J’y ai noté la présence de toiles de Monet, Pissarro, Chagall ou Courbet. Pas de tableau de Caillebotte, c’est bien fait pour lui.

La Knesset vue depuis le toit du musée

Le clou de notre visite, c’est une exposition temporaire intitulée The Lost Photographs of Israel, qui présente des images du cinéaste et photographe français Chris Marker.

Chris Marker s’est rendu en Israël en 1960. Il en est revenu avec des photos (qui ont été découvertes il y a quelques années seulement) et un documentaire intitulé Description d’un combat.

On retrouve dans les photographies exposées des instants du quotidien et des scènes de rue, ainsi que les visages des habitants d’un jeune pays (Israël a déclaré son indépendance en 1948). Les images de Marker, au style poétique, au ton neutre mais bienveillant, m’évoquent une espèce de mélange entre Henri Cartier-Bresson, pour le côté humaniste, et Raymond Depardon, pour l’aspect documentaire.

Fait intéressant, Chris Marker a réalisé en 1962 un court-métrage expérimental intitulé La Jetée. Celui-ci inspirera en 1995 le film de Terry Gilliam L’armée des douze singes.

Là où l’exposition photo offre une exploration de la mémoire d’Israël, La Jetée propose une autre exploration, celle des souvenirs d’un homme. On retrouve la même forme fragmentée : des instants du quotidien saisis par Marker dans ses photos ; la plongée dans des bribes d’événements vécus par le protagoniste du film.

Dans La Jetée, le personnage principal ne peut échapper à son passé ; le documentaire filmé, lui, révèle son côté prophétique à travers les commentaires qui en accompagnent les images. Malgré son aspect vieillot, du moins dans sa forme, il reste incroyablement pertinent et actuel.

Sur YouTube, vous pouvez accéder à Description d’un Combat et à La Jetée.


Après la visite, nous montons sur le toit du musée, ce qui permet d’accéder à un jardin et de faire un bon petit pique-nique.

Miam
“Amour” en hébreu, sur le toit du musée
Jérusalem depuis le toit du musée

Nous refaisons un bout de visite, et après un passage par le magasin du musée, nous quittons les lieux pour aller au cinoche, dans une cinémathèque d’un quartier de la ville où Bo-Katan, étudiante, avait ses habitudes. Le film qu’on a vu s’intitule « מאצ’ מושלם » et c’était plutôt bien.

Depuis la cinémathèque

En milieu d’après-midi, les trottoirs se remplissent d’ultra-orthodoxes revenant à pied de la synagogue. Barbe, chapeau, costume noir sur chemise blanche pour les hommes ; jupe longue et foulard dans les cheveux pour les femmes. Et une kyrielle d’enfants : le taux de fécondité des ultra-orthodoxes est de 6,6 enfants par femme.

Leur allure est intimidante, et reflète un mode de vie qui les place à la marge de la société. Pour autant, la distance n’est pas totale : en témoigne la gentillesse d’un vieux monsieur assis à côté de moi dans l’avion, ou la bienveillance d’un jeune croisé au marché du Carmel à Tel-Aviv.

En sortant du cinéma, il fait nuit.

On va faire un tour dans un festival de musique situé dans un parc tout proche. Le concert est à guichets fermés, mais on peut quand même rentrer et aller acheter à manger.

J’y croise un gars qui ressemble trait pour trait à un de mes collègues ; assez sympa, le type se laisse photographier et j’envoie l’image à mon collègue. Lequel répond “en fait, en ce moment, je suis beaucoup plus bronzé. Je ressemble à une patate au four, il ne reste plus qu’à ajouter de la crème fraîche et un peu de sel”.

Des stands vendent des produits artisanaux, le genre que vous trouvez sur un marché de Noël (pas de vin chaud ou de pain d’épices ici, cependant). Bo-Katan achète un collier qui lui sied à merveille.


Le lendemain, nous passons de nouveau la journée à Jérusalem, mais cette fois dans la vieille ville.

Tout d’abord, un petit tour au marché Mahane Yehuda, pour un petit dej et quelques emplettes. Dont un petit mélange d’épices noix de cajou-cacahouètes-za’atar, tout à fait du goût de Grogu.

Marché Mahane Yehuda
Riz avec les épices du marché

Nous visitons ensuite la Tour de David. Il s’agit d’une citadelle construite au IIème siècle avant J.-C. (donc rien à voir avec David, en réalité), elle a été ensuite plus ou moins détruite puis reconstruite/rénovée par tous ceux qui se sont succédés à Jérusalem. Après la Guerre des Six Jours en 1967, c’est devenu un musée.

Durant la visite, il est aussi question de la vieille ville de Jérusalem comme lieu saint.

Vous connaissez ce qu’on appelle le Mur des Lamentations. C’est une partie du mur de soutènement de l’esplanade de l’ancien temple de Jérusalem, sur la colline appelée Mont du Temple.

Pour les juifs, le premier temple, construit par Salomon au Xème siècle avant J.-C. et détruit en 586 avant J.-C. par les Babyloniens, servait à conserver l’Arche d’Alliance, qui contient les tables avec les dix commandements (pour plus d’informations sur l’Arche, voyez le documentaire “Les Aventuriers de l’Arche perdue”), dans un lieu appelé le Saint des Saints et considéré comme correspondant au Rocher de la Fondation. D’après le Talmud, c’est à partir de ce rocher que le monde a été créé.

Le second temple, construit en 516 avant J.-C., rénové par Hérode en 18 avant J.-C. (avec notamment le Mur) et détruit par l’empire romain en 70 après J.C., a remplacé le premier temple.

Le Mur des Lamentations est sacré car il est considéré comme étant le lieu le plus proche du Saint des Saints.

Second Temple

Pour les musulmans, le Rocher de la Fondation est l’endroit où le Prophète a voyagé depuis La Mecque sur une monture appelée Bouraq, vers “la mosquée la plus éloignée”, puis, à partir de là, est monté aux cieux, rencontré des prophètes (dont Moïse, Abraham et Jesus) ainsi que Dieu Lui-même, avant d’en redescendre avec les cinq prières quotidiennes, qui sont un des piliers de l’Islam.

Le Dôme du Rocher, toujours existant aujourd’hui, est donc un sanctuaire musulman construit sur l’emplacement du Rocher de la Fondation et constitue, avec la mosquée al-Aqsa (qui signifie justement “la mosquée la plus éloignée”) située non loin, l’Esplanade des Mosquées, le troisième lieu saint de l’Islam.

Bien que située dans un territoire revendiqué et contrôlé par Israël depuis 1967, la gestion du lieu est laissée au Concile suprême musulman, fondation religieuse islamique contrôlée par la Jordanie, et l’accès est fortement restreint pour les non-musulmans.

En doré, le Dôme du Rocher. Au fond à droite, le cimetière du Mont des Oliviers qui est le plus ancien cimetière juif dans le monde.

Les chrétiens, eux, accordent également un caractère sacré au Saint des Saints. Néanmoins, dans la tradition chrétienne, le lieu le plus important à Jérusalem est l’Eglise du Saint Sépulcre, réputée pour abriter le tombeau de Jésus-Christ.

Les toits gris : l’Eglise du Saint-Sépulcre

Après la visite de la Tour de David, nous nous rendons au Mur des Lamentations, appelé aussi le Kotel — un lieu magnétique. De nombreux fidèles y prient et il est obligatoire de porter une kippa pour s’en approcher.

En allant au Kotel
Kotel

Nous partons pour une visite guidée des tunnels du Mur et de ses fondations. En 1967, à la suite de la guerre des Six Jours, des archéologues israéliens ont mis au jour des pièces et tunnels où personne n’avait pénétré depuis presque deux mille ans.

Un peu de repos après la visite

Fin du voyage dans le temps, nous voilà revenus au présent. Nous rentrons chez les parents de Bo-Katan et passons la soirée avec eux.

Tout compte fait, je n’ai pas parlé de désert. Ce sera pour une prochaine fois. Peut-être.


Crédits :


And who by fire, who by water
Who in the sunshine, who in the night time
Who by high ordeal, who by common trial
Who in your merry merry month of may
Who by very slow decay
And who shall I say is calling?


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